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Miss Togo : Bientôt, la fin de l’odyssée

LE REPUBLICAIN Numéro 44 du 29 Août 2006
 Le 26 août dernier, les Togolais ont une fois encore suivi en direct " l’évènement, le spectacle " : l’élection de Miss Togo 2006. Et le sort cette année, est tombé sur une certaine Ajavon Sandra.
De tout temps, plus d’un se sont interrogés sur l’opportunité de ce spectacle. Pour ceux-là, le spectacle Miss Togo est un spectacle de trop, car il ne correspond qu’à une culture de débauche. Débauche car l’organisation, la manifestation blesse la pudeur, la morale africaine. Nous sommes en Afrique, on n’a pas besoin de copier systématiquement l’Occident. A titre d’exemple, les critères définis dans cette organisation pour sélectionner la " plus belle " ne sont pas justes aux yeux des Africains. Conséquence, le public bourde souvent la décision du jury, le public étant essentiellement composé de Togolais donc Africains. C’est ainsi que cette année encore Sandra n’a pas du tout eu la faveur du public qui a plutôt choisi Mlle Gougou Ama. En fin de compte, pour être élue Miss, il faut savoir parler le français. Ainsi celles qui répondent aux critères de la beauté africaines mais parlent de " la charme " ou " le dernier enveloppe " ne seront jamais élues.

Pour Jean, professeur de philo, " cette histoire de Miss n’a pas son sens d’être ". En effet c’est une occasion où les gens vont porter leur vision libidineuse sur les jeunes filles demi nues, exhibant les sourires forcés, déhanchant gracieusement à la cadence du dandinement de leur fesse. C’est comme au temps de l’animation politique. De fraîches jeunes élèves, parfois innocentes et sages avaient fini leur vie de jeune fille dans les bras des messieurs qui supervisaient l’animation depuis la tribune. Quand vous regardez deux personnes causer, pointant leur doigt vers le groupe choc, il faut savoir qu’ils sont en train de faire " le choix ".

On dirait que c’est cette tradition qui se perpétue. On a vu des jeunes filles qui, après leur élimination dans la course de Miss, convoitées par plusieurs " grotos " qui les ont découvertes justement pendant les élections.

Pour Jean, on ne voit vraiment pas en quoi " l’élection Miss ", est un évènement culturel. Si on veut valoriser la culture togolaise, il y a 1000 et 1 trésors à fouiller. " Pourquoi ne pas financer plutôt le FESTAPA (Festival du Tam-tam parlant) de Kévé où il y a des valeurs inépuisables à transmettre à nos générations " se demande –t-il. Puis il ajoute. " Il faut que cela cesse. On ne peut pas continuer à financer à coup de millions une activité improductive. On dira, certes, que c’est un évènement international. Oui mais, les autres pays ne sont pas à la traîne. Regardez, nous, nous avons trop de problèmes pour nous permettre ce divertissement. En fait, c’est un divertissement ", termine-t-il.

A la veille de la rentrée scolaire 2006-2007 alors que responsables d’établissements ; parents ne retrouvent pas les multiples inconnus aux équations qu’elle représente, il est malheureux que des sociétés investissent dans cette histoire de Miss à hauteur de millions de francs alors que justement ces candidates n’ont pas de bancs sur lesquels s’asseoir ni d’enseignants pour une bonne éducation. Et puisqu’il faut imiter les autres, pourquoi ne pas imiter la Miss du Bénin qui n’a qu’une moto plus quelques cadeaux ?
C’est compte tenu de tout cela qu’à la veille de l’évènement, des parents de trois candidates sont entrés à l’hôtel pour retirer leur progéniture. C’est pour cela qu’au départ de 20 candidates, elles ne sont que dix-sept à compétir. On se demande ce qu’attendaient les parents de ces dix-sept pour venir sauver leur progéniture ?
C’est aussi ce que certaines localités du Togo ont compris quand des habitants de ces localités ont refusé systématiquement cette histoire de Miss. Il est alors temps que les autres localités leur emboîtent le pas afin de sauver ce qui peut encore l’être.
C’est encore ce qui explique que les vraies " plus belles " ne participent pas au spectacle. Elles préfèrent rester en spectatrices, pour rire du français rocailleux que parlent leurs homologues ou encore voir leur laideur dans toute sa nudité.

Il y a tant de choses, tant de spectacles culturels au Togo qui peuvent faire la fierté de tous les Togolais. C’est ce que le premier ministre Edem Kodjo disait à peu près le 27 août dernier à Kévé. Lui qui n’a plus pris part à " l’événement " cette année, ayant compris peut-être que ce n’est pas ça.

Jean-David MESSANGAN