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Quand les motos deviennent des matelas tout confort pour les zémidjans à Lomé

Togo - Societe
Dans les grands centres urbains, le métier de conducteur de taxis-moto est en vogue. D’aucuns croient que la recrudescence de nombre de jeunes perchés sur les motos chinoises est l’apanage des jeunes diplômés désœuvrés. Pourtant, entre manque d’infrastructures dans les milieux ruraux et les besoins pour une agriculture modernes, les jeunes valides des contrées du Togo abandonnent les domaines arables pour les villes où les contraintes urbaines les obligent à faire de leurs motos, des chambres à coucher.
Tabligbo, Notsè, Aného, Aképé, Tsévié… des localités qui perdent davantage leurs bras valides au profit de la capitale. Les jeunes des villes environnantes de Lomé vendent les terres, s’achètent une moto et quittent leurs milieux pendant quelques jours pour faire du « Zémidjan » à Lomé.

Il n’est pas rare d’être confronté des conducteurs de motos aux haleines et odeurs corporelles insupportables. Les révélations de Guidima (jeune conducteur de taxi-moto originaire de Tabligbo) laissent une grande façade de lumière sur le phénomène.

Pris au piège au cours d'une discussion qu’il a engagé avec nous lors d’un trajet, il a fini par nous révéler qu’il est arrivé à Lomé depuis trois jours. Dans l’impossibilité de de se loger, il n’avait pour refuge que sa moto sur laquelle il passait ses nuits dans la gare routière d’Agbalépédo. Le bain ou le changement de vêtements sont les derniers de ses soucis.

Une sorte d’exode rural moderne qui semble en vogue, mais que l'Etat feigne d'ignorer. Le premier facteur défavorable est la parcellisation des terres dans les zones de départ. Dans ces villages où les grands domaines et les jeunes habiles sont une aubaine à l’essor de l'agriculture, les jeunes plus déterminés aux grandes réalisations préfèrent vendre les terres afin de s’acheter une moto.

En ville où les réalités sont bien plus difficiles que leurs attentes, très peu arrivent à se faire une place. Souvent distrait par les loisirs citadins, la loterie, les jeunes filles et l’alcool, on arrive à oublier les rêves de départ qui ont motivé le voyage.

Pour celui qui vient se chercher à Lomé pour quelques jours et celui qui vient pour y s’installer définitivement, les conséquences sont souvent très lamentables, parfois fatales (ceux qui ont perdu leurs vie dans les accidents pour non maîtrise du code de la route, par exemple).

Individuellement ou pour la nation en général, le phénomène n’est guère avantageux. « La jeunesse est l’avenir de ce pays »; telle est la formule magique que brandissent tous les hommes politiques dès que l’occasion leur est offerte. Mais ils sont très peu à cerner les réelles difficultés des jeunes sans même parler d’y trouver solutions idoines ; même ceux qui ont qualifié leurs mandats de « mandat social ».

Comment comprendre qu’au 21ème siècle, on continue de distribuer des houes et coupecoupes à des jeunes dans les zones rurales pour soit disant encourager le secteur agricole ? 75% de la population active du Togo vit de l’agriculture. Tout est à comprendre que ces jeunes gens ne vivent pas à Lomé. Et dire que tous les pouvoirs de l’Etat, tous les centres décisionnels concernant les secteurs agricole, les petites structures de transformations agricoles (PADAT, PNIASA, ministère de l’Agriculture, de l’élevage et de la pêche, NIOTO, FAN MILK) demeurent concentrés à Lomé.

Pour un pays qui fait de l’agriculture sa priorité, pourquoi ne pas créer une zone franche spécialement pour les unités de transformation agricole dans une contrée du pays facile d’accès ?

Cette initiation sera l’une dse mesures qui pourraient mieux renseigner les jeunes ruraux sur les avantages du métier d’agriculteur et les décourager peut-être d'embrasser le métier dangereux qu'est le Zémidjan. Créer de l’emploi et favoriser l’essor économique de nos milieux ruraux tout ouvrant le boulevard à la décentralisation, c'est ce qui peut remédier aux problèmes.

Pour l’instant, on se contente de lentes politiques laconiques qui en général ne représentent que des géants aux pieds d'argile. Pendant ce temps, nos terres sont davantage morcelées et vendues aux étrangers. Au même moment, les villes sont pleines de jeunes qui gâchent leur énergie précieuse à enrichir les industries de motos chinoises.

Et quand ils quittent les milieux ruraux pour faire deux ou trois jours dans la capitale avec leurs motos, ce sont les chaussés qu'ils transforment en dortoirs. Le plus triste, c'est qu'ils sont à la merci de ces gangs qui braquent et tuent presque tous les jours les conducteurs de taxi-moto.

A.L