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Sénouvo Agbota ZINSOU, Poète-Courtisan des Princes GNASSINGBé !!

Togo -
Au Togo, on est pour les Gnassingbé ou contre eux, et on le dit ouvertement ou non. On peut avoir été contre le père, hier, et être pour le Fils, aujourd’hui. Ou l’inverse, malgré les méthodes du pouvoir qui, elles, restent les mêmes. La logique d’un tel changement d’attitude s’explique aisément : un changement d’hommes au pouvoir entraîne forcément, selon certains, un changement de régime. Mais il y a une troisième manière, celle qui consiste dans l’attitude attentiste, aussi bien avec le père qu’avec le fils. On est alors ni pour ni contre, ou encore mieux : on était en même temps pour et contre le père, naguère ; on est pour et contre le fils aujourd’hui. Ou l’inverse. Ce dernier cas, celui des attentistes, s’avère des plus intéressants à observer car il y a chez eux une certaine constance que révèlent leurs écrits. C’est le cas du plus connu d’entre eux : le dramaturge et poète ZINSOU, réputé « grand écrivain » à ce que racontent, sans rien prouver du tout, certains zoulâtres ennivrés par ses comédies et certainement par du sodabi. Mais le personnage ne manque pas d’attrait, surtout qu’il pioche chez les artistes populaires, éwé et mina notamment, la matière exquise de ses écrits. On ne peut donc pas nier qu’il est bien en osmose avec le Peuple profond, cette partie du Peuple, sur laquelle il est fixé telle une sangsue. Cette partie populaire aux riches créations culturelles et artistiques dont il profite et de laquelle il tire des chansons qu’il retranscrit en poèmes sans mentionner le nom de l’auteur originel. Comme si dans nos traditions on ignorait le droit d’auteur. C’est du vol tout simplement car procéder ainsi ressemble à une spoliation et à une forfaiture. C’est chercher de la renommée à tout prix, au prix de la forfaiture et du mépris des artistes populaires!
Ce n’est donc pas juste de piquer une chanson, de la retranscrire sous la forme d’un poème à la française sans avoir l’obligation morale d’en mentionner l’auteur authentique ni donner les circonstances (deuil, mariage, manifestation politique etc.) dans lesquelles la chanson a été exécutée ou simplement comment le poète a pu la découvrir, et qu’est-ce qu’il y a ajouté ou soustrait étant donné que le chant populaire est déjà un poème en vers. «Car la versification, chez tous les peuples, est, par une sorte de nécessité, la première forme de l’art littéraire. Cette versification avait été créée par la mélodie et le rythme du chant, dont la poésie alors ne se séparait pas. » (Alfred et Maurice Croiset, Histoire de la Littérature grecque, p.9) Voilà pourquoi Senghor a soutenu tout au long de sa carrière de chantre de la Négritude que les chants et les chansons nègres, ceux de ses poétesses de son terroir et d’ailleurs, sont des poèmes à part entière, à l’instar des odes grecques, pindariques et autres anacréontiques.

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On doit donc souligner que le poème de Zinsou (« Ceux qui veulent manger notre Colombe Goûteront d’abord à ma bombe ») n’invente rien en soi car la versification, le rythme et la mélodie de ce poème lui ont été gratuitement donnés par l’artiste populaire, auteur de la chanson qui était peut-être déjà en français. En effet, il y a des artistes populaires qui parlent français. Si la chanson était en éwé ou en mina, il revenait au lettré poète et dramaturge Zinsou de préciser, comme fait tout bon lettré parti s’instruire auprès de nos artistes populaires, de préciser les sources ayant inspiré son poème, un poème apparemment tiré d’une chanson en éwé ou mina, une chanson qu’il n’a fait que retranscrire et formater en un français plus soutenu en y ajoutant, ou non, sa sensibilité artistique et idéologique. Néanmoins l’atout du transcripteur ne se confine donc pas à la seule exploitation de la langue française et à l’héritage scolaire et poétique lié à cette langue, héritage acquis sur les bancs de l’école française! Mais on peut protester contre cette retranscription en français, car il reste douteux qu’elle traduise entièrement l’âme de la chanson en question. C’est là un autre débat. Des artistes populaires peuvent produire en français, un français qui demeure le vestige probable d’un vieux fonds culturel hérité de l’école coloniale et instinctivement assimilé à leur culture ancestrale. Notre chanteur a pu donc sans peine produire directement sa chanson en français.

Certes, on doit reconnaître que la capacité de manier la langue française demeure un avantage certain ; cependant que vaut cette maîtrise d’une langue culturellement étrangère devant l’instinct créatif c’est-à-dire poétique de l’auteur de la chanson, condamné désormais à l’anonymat et risquant ainsi de ne pas toucher les droits d’auteur ni de recevoir les gratifications légitimes dues à son génie ? Espérons que le poète et dramaturge Zinsou donnera le nom du chanteur afin qu’il soit reconnu et honoré par ceux qui apprécient ses créations poétiques. Mais Zinsou ne le fera pas, par prudence et afin de ne pas mettre la vie du chanteur en danger. Les méthodes sous Faure sont ceux de son père, comme Zinsou le rappelle adroitement dans son poème :

« Monsieur, vous c'est vous, lui, c'est lui
Comment? M'avez-vous bien compris :
Lui, c'est moi aujourd'hui.
Je lui ressemble, oui ou non?
Oh, Prince éléphanteau, pardon. »

Le poète-courtisan se foulera-t-il la rate et fera-t-il de la prudence sa ligne de conduite ? Prudence probable et louable mais il est permis de douter. Car l’estime du Prince changerait de camp ! Plutôt gratifier un artiste populaire qu’un intellectuel malin et hypocrite, se dira son Prince.
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Toutefois, est-ce à dire que le nouveau poème tiré de la chanson reflète exactement l’émotion qui animait l’artiste populaire? Ce dernier est-il responsable de l’orientation idéologique que celui qui exploite sa chanson imprime dans un poème même tiré de sa chanson? Est-ce le chanteur qui spécifie que sa chanson est une « Petite chanson pour rigoler, pas pour provoquer la révolte) ou est-ce Zinsou qui le spécifie ? Et pourquoi ? Voilà la problématique. Pourquoi le poète et dramaturge Zinsou aurait-il éprouvé le besoin de dégoupiller une création qui exprimait peut–être un sentiment de révolte autrement plus volcanique. Pour plaire à Faure Gnassingbé sacré ‘’Prince’’, ‘’Prince Gnassingbé’’ dans un article retentissant le Mercredi, 3 Juin 2015(« Bravo, Prince Gnassingbé » (https://www.icilome.com/articles/?idnews=806678&t=Bravo,-Prince Gnassingbe)
Il est manifeste que Zinsou n’a pas vraisemblablement respecté les émotions du chanteur pour qui, logiquement, Faure ne peut pas être un « Prince ». Par conséquent, on peut affirmer que ce mot de « Prince », contenu dans le poème de Zinsou, ne figure pas dans la chanson interpolée. Si c’était le cas, le mot serait prononcé autrement sinon bizarrement et Zinsou aurait exploité cette étrangeté consécutive à une prononcia-tion difficile du mot pour en faire un objet dramatique, comique. Comme le cas comique des bégaiements supposé de Faure dans son poème.
Bref, la chanson interpolée serait en mina ou éwé et en vis-à-vis du poème de Zinsou qu’on pourrait répondre avec pertinence sans multiplier les questions inutilement. Mais il reste la question essentielle : celle qui concerne la nature et le message que véhicule le poème en question. Elle paraît liée au rôle que Zinsou, le dramaturge, se donne ou joue. Une question dont se fichent pas mal de zinsouphiles et zinsoulâtres, heureux de jouir de la musique non pas du poème mais de la chanson ; une musique de la chanson qu’ils devinent derrière le poème qu’ils retraduisent sans doute en éwé ou en mina. Peut-être, connaissent-ils tout simplement la chanson en éwé ou en mina! Ce dont on peut douter puisqu’ils sont incapables de la moindre critique devant un poème d’origine aussi définissable. Mais la musique et le rythme du poème, empruntés à la chanson, leur suffisent. Une musique que le dramaturge et poète Zinsou voudrait envoûtante, agréable à entendre aux deux camps des pour et des contre les Gnassingbé.

Mais ceux qui savent lire ne se laissent pas conter ni abuser par des gesticulations littéraires qui tentent de dérober la couleur idéologique du poète-dramaturge, couleur idéologique qui ne peut être cachée qu’à ceux qui ne savent pas lire ou qui, ne comprenant pas ce qu’ils lisent ne cherchent même pas à comprendre. Leur maître, qui leur offre un poème, leur a-t-il susurré à l’oreille qu’il s’agit d’« une chanson pour rigoler, non pas pour se révolter », qu’ils sautent de joie et s’efforce de trouver les sons agréables du texte, se contentant ainsi de la paille plutôt que de rechercher la substantifique moelle du contenu de la transcription. Mais laissons ces macaques sans culture malgré de prétendus diplômes et allons à l’essentiel.

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Sénouvo Agbota Nestor ZINSOU qui, à défaut de se voir nommer prince des poètes du Togo, d’Afrique, du Monde et d’ailleurs, de Mars par exemple !, aspire, article après article, création littéraire après création littéraire, à faire entrer dans le cerveau de ses lecteurs l’idée qu’il est le poète attitré des princes politiques du Togo. C’est une obsession quasi maladive et nombreux sont les textes en effet qui la signalent. Cependant ne forçons pas la signification que le dramaturge Zinsou donne à son imagination, si débordante. Il pose sans doute des énigmes dont celle de se prendre sinon de se faire passer pour le poète en titre des princes qui jouissent et abusent du pouvoir au Togo. Alors, essayons de résoudre celle-là.
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Naguère, c’est le Général qu’il loua et chanta dans un ouvrage(Le Soldat) qui lui vaut blâmes et inimitiés encore aujourd’hui. Il aurait reçu, à ce qu’on dit, moult félicita-tions et bien des choses de la part du général, qu’il sacre prince Gnassingbé I dans sa dernière livraison (Nos limites et étroitesses.)

Mais le tyran ne le nomma jamais ministre de la Propagande, ce qui reste mystérieux puisque beaucoup l’ont été pour moins que cet effort livresque. Zinsou, ministre du général ?, ça lui aurait beaucoup plu car il adore être griot des Gnassingbé. Il a, à ce qu’il semble, la vassalité dans le sang puisqu’il persiste dans sa passion et chante maintenant Faure Gnassingbé à travers des articles innombrables et retentissants. C’est lui qui voit en Faure un « Prince » qu’il sacre < Ceux qui veulent manger notre Colombe Goûteront d’abord à ma bombe », Petite chanson pour rigoler, pas pour provoquer la révolte), un poème qui s’apparente à un emprunt interpolé car « pris » volé) visiblement à un artiste populaire, le besoin qu’il éprouve d’avertir son lecteur sur le sens à ne pas donner à son poème. Ce n’est donc pas une invitation à l’assaut du pouvoir sanguinaire de Faure Gnassingbé, pouvoir volé au Peuple togolais et depuis lors confisqué élection truquée après élection truquée.

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Non, c’est une erreur grave pour ceux qui croient que le dramaturge Zinsou vient, par son poème, regonfler les énergies populaires et distiller un message revigorant qui redonne l’espoir à un Peuple togolais plongé dans une terrible gueule de bois infligée lors de la dernière élection présidentielle truquée. Il n’en est rien en fait puisque Zinsou se fait plus que jamais le poète de Faure, qu’il nomme, avons-nous dit, « Prince » par deux fois dans son poème.

Une telle manie du culte de la personne, manie idolâtre, accrédite l’idée que le prétendu ‘’Poète des princes’’ ne tient aucun compte de l’émoi qu’il provoque quand il qualifie Faure de ‘’Prince Gnassingbé’’. Cela n’étonne pas puisqu’il travaille pour son seul ventre et non pas dans l’intérêt du Peuple togolais dont il se fiche absolument. Le titre de son poème va dans ce sens. C’est un panneau rouge qu’il dresse en guise de mise en garde à ceux qui seraient tentés de détourner sa production littéraire.

Cependant, on peut se demander si ce titre monstrueux et invraisemblable est bien de son cru. On dirait qu’il crie, tel un héraut, le message d’autrui. En effet, si le message était de lui et en direction du Peuple togolais il userait d’un style qui harangue ou modère et non pas d’une menace aussi abjecte et honteuse. Pour résumer, il dissuade et décourage le Peuple togolais en recourant à un titre qui ne souffre d’aucune ambiguïté tant l’image demeure saisissante. D’où l’absence du conditionnel et l’adoption d’un ton martial performatif. Il ne dit pas « ceux qui voudraient manger….. » mais bien « ceux qui veulent manger… ». Comme si le Peuple Togolais n’était qu’un tas de mangeurs, de profiteurs, de sales mouches gênantes à écraser sans pitié, tel qu’il se plait à portraiturer ce cher Peuple togolais, un Peuple qu’il méprise viscéralement. Le lexique (« gens», « fous », « monde qui prend», « démocratie copieu-se »…) des vers suivants l’indique clairement:


« Riz, macaroni et petits sous... Ces gens sont devenus des fous !» (…)

«Monde qui prend mes billets de banque

Même quand je déclenche mon bang!bang!bang! » (…)

« Avoir ma propre démocratie Copieuse, à ma table à ma table bien servie»


Visiblement, le poète-courtisan et son prince préfèrent voir les Togolais dans cet état de quémandeurs à vie, de mouches qu’on tue allègrement (« bang!bang!bang! »). Un Peuple qui ne doit pas, claironne le poème, se rebeller et rejeter la servitude et l’oppression que Faure lui impose. Le prix à payer est fixé d’avance et le Peuple paye comptant : la mort par canonnade! Voilà le message répercuté par Zinsou dans le titre et le dernier vers de sa production.

Il se veut le confident et le Héraut-messager de Faure, son Prince en qui il a une totale confiance. Une complicité les lie, qu’expriment les petits noms (« Eléphanteau », « Monsieur Le Fort »…), la tendresse et l’obséquiosité même («Cher Monsieur », «Oh, Prince éléphanteau, pardon ». Il donne même l’impression gênante de vivre dans une grande intimité avec un prince dont il connaît les caprices et le niveau de culture. D’où des phrases d’un français srabeux glissé dans la bouche de son Prince bien-aimé :

Hors de cela il n'y a pas d'aune
Pour bien mesurer ma santé
Et même ma légitimité
Que j'ai, par mon père, dans le sang,
Lui, fier et robuste Eléphant

Et surtout le choix d’un titre choc d’avertissement sans rhétorique superflue : « Ceux qui veulent manger notre Colombe Goûteront d’abord à ma bombe »

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Le poète peut faire allusion à des évènements liés au monument dit « La colombe de la Paix », à partir desquels évènements il tire une émotion artistique particulière qu’il exprime sous la forme d’un poème, un poème qui n’est néanmoins pas une « Marseillaise » galvanisante à l’adresse du Peuple togolais. Comble d’impudence, le poète Zinsou se positionne donc comme porteur d’un message, qui n’est pas le sien mais auquel il prête, débordant d’imagination, une forme poétique : celle du poète de Cour, celle de courtisan. En vérité, celle du dialogue tirée de ses lectures studieuses des comédies de Molière. En effet, le poète dialogue avec son prince, tel un poète de Cour qui a gagné la confiance de son prince. Mais on pense plutôt au comique né des échanges entre Harpagon et son maître (dans l’Avare), ou un autre duo de ce type du théâtre cher à Molière. Mais gardons l’image d’un échange entre un prince et son poète favori devenu son confident même si on peut déplorer que Zinsou n’élève pas le débat par l’introduction judicieuse de sujets politiques. Néanmoins, le poème pose un grand problème, celui de la trahison politique consistant à suivre Faure dans ses rêves démagogiques d’une nouvelle démocratie, à laquelle le poète-courtisan adhère et qu’il chante malgré lui ; du moins veut-il le faire croire :


«Mais chantez-moi démocratie
Avez-vous compris : je l’ordonne
Oui, je veux aussi qu’on entonne
L’hymne que mon père vous a appris
Monsieur, vous c’est vous, lui, c’est lui
Comment ? M’avez-vous bien compris :
Lui, c’est moi aujourd’hui.
Je lui ressemble, oui ou non ?
Oh, Prince éléphanteau, pardon.
C’est un peu compliqué, mais d’accord
Puisque vous êtes Monsieur Le Fort…
Démo… ! Voilà pour vous démo… !
Comment ? Vous faites le rigolo ?
Excusez-moi, je tousse un peu
Mais au fond je suis très sérieux
Démo ! Chez les civilisés
Tout comme chez mes doux chimpanzés
La même aussi chez les léopards
Quoi, qui ose dire soudards ?
Insolent, quel est ce langage ?
Non, je respecte la gent sauvage
Alors, encore démo ! Démo !
Du moment où ça s’arrête aux mots
C’est une des plus merveilleuses choses
Qu’on adapte bien à toutes les sauces. »


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Le poète-courtisan sait bien que la démocratie de son Prince n’est pas la démocratie véritable à laquelle aspire le Peuple togolais. Mais qu’importe puisque c’est pour lui un mot auquel on donne le contenu qu’on veut. Dès lors elle vaut aussi pour les animaux. Le Peuple étant aux yeux du poète-courtisan une sorte d’animal (« des chimpanzés ») ; dès lors il est normal de lui octroyer la démocratie, celle justement que veut lui imposer le Prince et son poète de cour. Une démocratie de soumission aveugle et totale : « une démocratie copieuse » et de « soudards » dont le Peuple ne veut pas! Celui-ci rêve de la vraie démocratie, celle en vigueur partout et « chez les civilisés ». C’est donc un Peuple instruit qui sait que la démocratie est un état d’esprit pratique et exigeant. Il est prêt à en payer le prix. Le Poète-courtisan est au courant et le révèle à son Prince puisque cet état politique prérévolution-naire de la société et du Peuple togolais est inconnu de ce Prince si différent et si éloigné de lui. « Ça chauffe, Monsieur Le Fort, ça chauffe! », indique-t-il à son Prince-Gnassingbé. « Ça chauffe », un leitmotiv que ne comprend pas vraiment le Prince Gnassingbé. Et le traître d’expliciter le contenu de sa trahison à un Prince présenté comme un personnage politique des plus éloignés des préoccupations du Peuple togolais. Un Peuple qui aspire à une démocratie authentique, qui n’est pas celle que le Prince de sacré par Zinsou veut imposer au Peuple, un Peuple prêt à renverser les idoles du régime, à se rebeller, à casser les monuments de la dictature. Le poète-courtisan se presse de vendre la mèche, de trahir et d’exciter la colère de son Prince :

« Cher Monsieur, ce peuple se rebelle

Il vise votre Colombe paternelle

Notre Colombe ? Ha !plutôt leur tombe !»

Le poète-courtisan se fiche de voir massacrer un Peuple à partir du moment où il donne des gages de très haute fidélidé par la trahison ! Quelle honte ! Qu’importe, il s’agit pour lui de sauver son avenir, qu’il conçoit tout près de Faure ou tout accroché à quelque rente juteuse tombé de la bourse de son prince, et nulle part.

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On peut admirer la qualité dramatique du dialogue tant il est tendu par un substrat psychologique vraisemblable. Même si on peut déplorer que le poète-courtisan préfère en réalité la pitrerie des bégaiements, car plus désireux de faire rire que de pousser à la réflexion. Ses réparties le montrent assez. Le ballet n’est pas absent de l’esprit dramatique ou dramaturgique du poète, les échanges entre les deux personnages du poème, échanges ponctués de bégaiements imaginaires et de réactions brutales auxquelles pousse le poète courtisan par l’évocation maligne des jouets idéologiques (‘’Colombe de la Paix’’, « Faune » Etc.)chers au cœur puéril du prince l’indiquent mais ne nous dispersons pas trop.
Toutefois, une telle vraisemblance ne peut pas ne pas poser problème : ou bien Zinsou a été au courant d’un tel projet de destruction de la Colombe et a trahi, ou bien il fréquente Faure qu’il semble bien connaître ; ce qui revient, dans les deux cas, à croire qu’il est un agent double : de Faure à qui il révèle ce qu’il recueille auprès de la partie du Peuple togolais qui lui fait confiance. Il est alors vraiment bien placé pour jouer les cafards ou mouchards, les espions à l’oreille de son Prince, ou à travers ses poèmes et articles qui donnent à entendre au Peuple les menaces et projets criminel du Prince !

Finalement, il approuve le statuquo politique qui prévaut actuellement au Togo, celui de l’immobilisme dégradant, celui du discours politique de son Prince : « démocratie copieuse des petits sous et des petits fours, démocratie avilissante de dormeurs, de soudards et de soulards », dociles à souhait.

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L’imagination artistique de Zinsou reste sans bornes. Elle autorise par conséquent des lectures multiples. Peut-être. C’est pourquoi, c’est insensé de vouloir obliger les lecteurs à adopter une seule attitude, celle d’applaudir béatement un homme qui a peut-être plus d’une facette politique, plus d’une cas-quette. Ce qui revient à admettre qu’on ne le connaîtra pas vraiment. Politiquement, c’est un homme pas du tout clair et probablement dangereux.

Pour ma part, tant que Zinsou produira ce sera un rendez-vous agréable pour l’étudier. Afin de comprendre ce qu’il dit ou ce qu’il affirme être sans vouloir ou pouvoir l’écrire vraiment. C’est un devoir sacré à ne fuir jamais !
Evidemment, notre dramaturge national prétendra que tous ses écrits sont une manière ironique d’approcher les choses. Pourquoi pas! A condition de savoir en quoi consiste l’ironie. Pour cela, il faut se mettre à l’école de Socrate, le maître du genre. Dans quelle bourgade ?? Il faut donc lire les Dialogues de Platon, bon sang !!

Agôn PICDAGOU.