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Pourquoi je ne marcherai pas Samedi

Togo - Opinions
Il paraît que la coalition de l´opposition organise une marche Samedi prochain à Lomé et dans toutes les villes de l´intérieur. Normalement je suis un partisan des actions de protestation, marches, sittings ou autres, contre un pouvoir de dictature pour l´obliger à plier. Mais à un moment donné de la lutte et vu certaines circonstances, je peux me permettre de me poser certaines questions en doutant du bien-fondé des actes qu´on me demande de poser. Ici et aujourd´hui il s´agit de la méthode et de la stratégie avec lesquelles la lutte doit être menée en tenant compte de l´état du terrain sur lequel nous évoluons. Est-il opportun de marcher pour marcher? Doit-on marcher pour faire sensation ou pour engrager des résultats?
Je ne marcherai pas Samedi et voici mes raisons:

Le rôle d´un leader politique est de montrer la voie à la grande masse, car il est supposé avoir un certain niveau et surtout un bagage d´expérience politique qui lui permet de pouvoir jauger le pour et le contre afin de prendre la décision qui s´impose en cas de crise. Les populations attendent beaucoup des chefs politiques qui doivent convaincre par des arguments plausibles en expliquant pourquoi ils penchent plutôt pour une démarche et pas pour une autre. Les masses tendent à être impatientes et incontrôlables, à vouloir tout tout de suite, surtout en période de crise comme c´est le cas actuellement au Togo. Les convaincre et canaliser les énergies n´est pas chose facile; et c´est ici que les leaders politiques jouent leur rôle, c´est pourquoi ils sont là. Alors les populations sont dans leur droit de vouloir rapidement en découdre avec le dictateur, mais leurs chefs à qui elles font confiance, sont ceux qui doivent convaincre en proposant les méthodes et le moment de leur application. Donc on ne manifeste pas pour faire sensation, pour plaire, mais pour avoir des résultats.

Les itinéraires des dernières marches, surtout celles de Togo-Debout Samedi dernier, avaient été dictés par le pouvoir. Les marches ainsi confinées dans des quartiers périphériques, n´ont aucun impact sur le régime. Une manifestation est organisée pour se faire remarquer et faire mal en bloquant les principales artères et non pour faire plaisir au pouvoir qui se frotte les mains d´avoir réussi à renvoyer les marches des opposants dans des quartiers insignifiants.

La décision de marcher Samedi prochain avait été prise à la fin de la marche la semaine passée, et nous savons tous que les leaders de la C14 s´étaient envolés tout juste après sur Konakry pour une réunion du Comité de suivi de la CEDEAO en présence d´un des deux facilitateurs. Pourquoi ne pas attendre les résultats de Konakry avant toute décision?
Les populations togolaises ne doivent pas avoir la mémoire courte et doivent se rappeler des marches du FRAC au lendemain de l´élection présidentielle de 2010. Les togolais avaient battu le pavé en se rendant à la plage pendant cinq bonnes années sans résultats; déçus, beaucoup avaient dû se détourner de la politique jusqu´au 19 Août 2017. Je crains que les marches, ainsi organisées selon les desiderata du régime, ne finissent banalisées comme de 2010 à 2015. Ou certains jouent-ils le jeu du pouvoir et veulent voir les revendications du peuple s´étioler comme une peau de chagrin? Nous n´ avons pas le droit de faire perdre à la population le goût des manifestations en les organisant sans avoir pris le temps de choisir le meilleur moment.

Enfin ma dernière raison est celle liée à la sécurité des togolais. Ce qui se passe aujourd´hui à Tchaoudjo avec des militaires qui jouent au Rambo avec des armes de guerre face aux populations civiles aux mains nues, peut se passer à Kpalimé, à Kara, à Aného etc... C´est le problème de l´armée dans son ensemble qu´il faut chercher à résoudre en initiant une diplomatie discrète auprès des chefs d´état de la sous-région au lieu de perdre notre temps à nous quereller pour des marches organisées dans la précipitation.

En attendant d´écouter les résultats de Konakry et de voir jusqu´où la CEDEAO ira dans son comportement à notre encontre, je ne marcherai pas Samedi prochain.

Samari Tchadjobo