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Des milliers d’enfants à Kinshasa considérés comme des sorciers (UNICEF)

Congo RDC - Societe
Plus de treize mille enfants à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC), seraient considérés comme des sorciers ou ‘ndoki’, explique le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF).
Ces enfants sont qualifiés de ‘sorciers’ et tenus responsables des maux de familles vulnérables par des faux prophètes et pasteurs, et finissent souvent à la rue, précise l'agence onusienne.

« A la mort de ma grand-mère, nous sommes allés à l’église de mon grand-père pour le deuil. Le pasteur m’a désigné. Il a dit que j’avais mangé ma grand-mère. Ils m’ont gardé enfermé à l’église avec des cordes aux pieds et aux mains... J’ai fui pour retrouver ma famille. Ils m’ont battu pour que j’avoue. J’ai fui dans la rue », témoigne Exaucé, un Kinois âgé de 13 ans.

Selon l’UNICEF, de multiples facteurs économiques, politiques et sociaux contribuent à ce phénomène, dont l’ignorance, la pauvreté, le manque de moyens pour subvenir aux frais de scolarité des enfants ou les dégâts de la guerre qui augmentent le nombre d’orphelins.

Faire pipi au lit, avoir un sommeil agité, le ventre ballonné, et le handicap sont considérés comme étant des « preuves » que l’enfant est un sorcier.

Les enfants soi-disant coupables de la pauvreté, de la mort d’un membre de la famille, du manque de réussite sont déposés dans des églises dirigées par des « faux prophètes et pasteurs ». Agissant sous couvert d’une lutte contre le Mal, ces derniers disent voir un esprit maléfique dans le corps de l’enfant qui serait donc à l’origine de tous les malheurs de la famille.
Séances d'exorcisme

Les églises peuvent demander entre 5.000 et 50.000 francs congolais [soit entre 3 et 30 euros] pour une séance d’exorcisme, précise l’UNICEF.

Certaines estiment par exemple que la soi-disant substance sorcière se loge dans l’abdomen de l’enfant-sorcier. Le médecin praticien traditionnel « soigne » alors la condition en découpant le ventre de l’enfant avec un couteau non stérilisé et amputant un petit morceau de son intestin, symbolisant la sorcellerie.

« On faisait le jeûne pendant trois jours. Puis, je prenais la purge : un litre d’huile de palme à avaler. On nous mettait dans les yeux une eau qui nous faisait pleurer. J’ai dit que je n’étais pas sorcier et que je ne comprenais rien de tout cela. Mais on voulait que je fasse la délivrance. On me versait la bougie fondue sur les pieds et le front », raconte Exaucé.

Lorsque les soi-disant remèdes n’apportent pas de solution au sommeil agité, au ventre ballonné ou à la pauvreté familiale, les enfants sont abandonnés par leur entourage et se retrouvent dans la rue, exposés aux violences physiques et sexuelles, ajoute l’UNICEF. « Les enfants ne vivent plus, mais ils survivent en travaillant, les filles se prostituent dès 6 ou 7 ans ».
Appel à l’action

L’UNICEF appelle à approfondir les connaissances sur ce phénomène afin de sensibiliser les populations et de lutter contre ces pratiques. L’agence souligne les droits fondamentaux de chaque enfant, prescrits tant dans la Déclaration universelle que par la loi congolaise.

D’après l’article 19 de la Convention relative aux Droits de l’Enfant, chaque enfant doit être « protégé contre toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalités physique ou mentale, d’abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation ».

L’article 160 de la loi n°09/001 portant sur la protection de l’enfant stipule aussi qu’ « en cas d’accusation de sorcellerie à l’égard d’un enfant, l’auteur est puni d’un à trois ans de servitude pénale principale et d’une amende de 200.000 à un million de francs congolais ».

Toutefois selon l’UNICEF, ces lois ne sont pas appliquées et beaucoup d’enfants périssent alors que les solutions existent.

Pour que ces droits soient appliqués, l’UNICEF prône le dialogue entre communautés, autorités locales, praticiens traditionnels et chefs d’église, en insistant sur les droits de l’enfant. La sensibilisation des magistrats, la réglementation des activités des églises concernées, et des licences dispensées aux médecins traditionnels seraient également nécessaires.