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Koffi Kounté trouve scandaleuse la révision de la loi Bodjona

Togo - Politique
L’ex-président de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), aujourd’hui en exil en France, dans une analyse claire et pertinente, estime que la modification de la loi organique 2011 est une grave atteinte à la liberté de manifestation.
Koffi Kounté connait bien la loi dite Bodjona pour avoir été l’un de ceux qui ont participé à la rédaction de ce texte. Pour des besoins de conservation du pouvoir, le régime cinquantenaire la vide de sa quintessence. Ce 7 août, les députés à l’Assemblée nationale l’ont révisée.

Le ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales, Payadowa Boukpessi l’explique par le souci de mieux encadrer les manifestations et de préserver la sécurité.

L’avis de Kounté

Cette loi sur les manifestations publiques était une avancée en matière de liberté publique au Togo. Sa révision montre que le pouvoir en place ne veut plus de manifestations publiques de ses contradicteurs ou les réduire au maximum.

La modification de la loi Bodjona, insiste le magistrat, constitue « un grand recul en matière des Droits de l’Homme. Je pense que les auteurs de cet acte n’ont pas mesuré le degré d’irresponsabilité qu’ils ont pris », analyse-t-il au micro de la radio Kanal K en Suisse.

Fruit du concours de plusieurs personnes issues du gouvernement d’alors, de la société civile et d’autres organisations de défenses des droits de l’homme, la loi de 2011 trouve son origine dans la Constitution togolaise qui accorde une place importante à la liberté de manifestations. En réalité, la loi organique ne vient qu’ « organiser la tenue de ces manifestations » consacrées dans la Loi fondamentale.

« Nous avons dû batailler, plaider pour que finalement le gouvernement accepte de faire voter une loi sur les manifestations publiques. Aujourd’hui, nous sommes très déçus de voir que de 2011 à 2019, soit 08 ans après, on vienne réduire l’espace démocratique par la révision apportée à cette loi. C’est quand même ignoble d’agir de la manière dont les parlementaires l’ont fait la dernière fois », regrette le magistrat.

L’argument du ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales est trop simpliste parce que, relève Koffi Kounté, ce n’est pas parce qu’il peut y avoir des débordements lors des manifestations pacifiques publiques qu’il faut restreindre cette liberté. Mais il revient aux forces de l’ordre et de la sécurité de gérer avec professionnalisme les manifestations.

Kounté, l’exilé

Ce magistrat de 60 ans, alors président de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) a dû fuir précipitamment le Togo suite à la publication du rapport d’enquête, confirmant la commission des actes de torture sur les accusés dans l’affaire du fameux coup d’Etat contre la sûreté intérieure de l’Etat de 2009 dans lequel le demi-frère de Faure Gnassingbé, Kpatcha, est présenté comme le cerveau de l’opération.

En février 2012, la CNDH publie le vrai rapport. Deux jours plus tard, une autre version, celle édulcorée est publiée par le gouvernement. Il faut dire que cette enquête met en cause des personnalités qui dirigent la redoutable Agence nationale de renseignement (ANR).
Koffi Kounté, sous la pression, fuit son pays et trouve refuge en France. Et déclarera plus tard qu’il a « essayé d’expliquer à (ses) interlocuteurs qu’accepter ce rapport et prendre des sanctions exemplaires serait la preuve que le gouvernement s’inscrit dans une logique de lutte contre l’impunité en vain ».

Lui aussi trouve que les mesures liberticides qu’est en train de prendre Lomé II pourraient faire du bien à ses compatriotes d’autant plus « qu’à force de vouloir restreindre l’espace démocratique comme il est en train d’être envisagé chez nous, eh bien, le pouvoir lui-même est en train de tracer le lit de son propre abîme ».

L’exilé nourrit-il l’envie de retourner au bercail, auprès des siens ? L’intéressé semble connaître suffisamment le système en place pour prendre ce risque.

« C’est une motivation tout à fait légitime. Mais entre cette aspiration légitime et être naïf ou être dupe, il y a un grand écart. Nul n’est dupe et je pense que nous connaissons le fonctionnement du système chez nous au pays. Donc, ce n’est même pas la peine d’envisager ce retour dans le contexte actuel », tranche-t-il sans ambages.

Le ministre Christian Trimua assurait, il y a quelques jours, devant le Comité des Nations Unies contre la torture, qu’il est favorable au retour de son compatriote Kounte.

A.H.