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Politique : La Stature, l’Étoffe et l’Ethos

Togo - Politique
La politique ne peut être une occupation laissée entre les mains d’hommes ordinaires. Elle est une affaire trop sérieuse qui ne doit pas tomber, s’installer et s’étaler dans la basse cour de gens de besoins. Les indigents de tous genres qui sont déficients en morale, qui sont démunis de deniers et qui sont dépourvus de savoir ne peuvent pas s’occuper du destin d’un peuple. Ils noieront fatalement la nation dans les abysses de la misère et de la désolation. Celui qui ose descendre dans l’arène des charges publiques doit s’être soumis au préalable à une triple épreuve ; celle du souffle, celle du fluide et celle de la glaise. Tout autre voie en dehors de ce triplet initiatique sera une veine entreprise et restera sans issue.
De La Stature

La stature politique d’un homme se mesure à la grandeur de la vision qu’il porte, de l’idéal qu’il conçoit. Les contours de la hauteur et de l’ampleur d’une vision pour le vivre ensemble du grand nombre, le peule, sont tracés à l’aide de l’intelligence conceptuelle. Il s’agit de la capacité à concevoir un appareil sociétal autonome dont les pièces composantes et les rouages agencés tournent et interagissent dans une harmonie presque-parfait et toujours dans un processus d’amélioration. La matière saine consommable, le service adéquat à disposition et le loisir régénérant l’esprit sortent alors, à bons résultats, comme produits finis de cet appareil entrevu.

Celui qui n’est pas capable de concevoir un tel objet supérieur, humainement agencé et socialement mécanisé, qui tourne et sort des résultats concrets et bénéfiques constatables, n’est pas apte à la responsabilité politique. Il n’en a pas la stature. S’il ose, il est un imposteur abject.

Concevoir et piloter à la fois un tel appareil demande d’être détenteur de la science politique, d’être praticien de l’art de la tempérance éthique et dépositaire d’un courage martial. Prétendre avoir cette capacité et par conséquent se sentir le meilleur candidat ‘appelé’ pour montrer la Voie et tenir le gouvernail, est un sacerdoce nobiliaire.

Une candidature à la magistrature suprême d’une nation n’est pas une aventure de gueux en esprit et de hasardeux orpailleurs à la recherche d’une pitance pour faire la bombance dans les taudis de la tribu le temps d’une saison politique éphémère. Rien de nobiliaire ne réside en une telle aventure.

La stature prend toujours contour dans l’épreuve du feu, ce souffle ardent qui s’illumine dans l’imagination, l’intuition baptiste de la vision. La stature politique, c’est l’Esprit en partie qui s’incarne sous une forme intelligible, dans une représentation créative cohérente, programmable et matériellement constructible.

Dans l’histoire Akhenaton de l’Egypte Antique avec ses réformes socio-culturelles, Solon l’Athénien de la Grèce antique avec ses réformes socio-politiques, et Franklin Roosevelt des Etats-Unis d’Amérique avec ses réformes socio-économiques sont des exemples de grandes statures politiques exceptionnelles. Nos candidats doivent s’inspirer de ceux-là mis en commun pour se construire de la stature nécessaire pour les défis actuels. S’ils ne le peuvent, rien ne vaut les peines qu’ils se donnent à la face du Peuple.

De L’Étoffe

L’étoffe est par rapport à la stature ce que les strates géologiques sont à une chaîne rocheuse. C’est à dire des couches de sédiments solidifiés durant des âges. En l’homme cela s’appelle de l’expérience de vie pratique sur une durée lente de maturation de l’esprit qui, dans une tension vers une Vision, incorpore consciencieusement chaque idée apprise et chaque acte posé au quotidien.

Doté d’un tel patrimoine, l’homme étoffé a du répondant verbal et scriptural à propos. Car il a un champ de connaissance théorique et pratique générale assez large pour y puiser des éléments d’un propos quasi docte et franc, d’un discours construit et articulé qui fait sens chez tout esprit ordinaire. Le discours clair est le véhicule d’une étoffe polie, policée qui expose des évidences pratiques, utiles et avantageuses aux yeux de la majorité sensée.

Cette qualité tient surtout d’un calibrage de facteurs socioculturels multiples chez le sujet parlant et agissant. Les certifications académiques y jouent un rôle mais moindre par rapport à l’auto érudition encyclopédique et à l’apprentissage oratoire et dissertatif, puis à la répétition, l’entrainement qui forme le talent et le reflexe de la narration persuasive.

L’étoffe ne s’improvise pas ; quoique le propos d’un instant de l’aspirant peut être improvisé. Car ledit propos est prélevé spontanément et directement sur le patrimoine déjà assis et bien mature. Le don naturel, s’il y en ait, celle de la parole et de la graphie, doit toujours se sculpter dans le talent. Du don, il faut distinguer le talent.

Le talent est par rapport au don ce que le joyau est par rapport au minerais brut. On cultive, sculpte le don pour atteindre et acquérir le talent. En ce qui concerne en particulier l’étoffe politique, atteindre cet état d’être devient un précieux dosage raffiné du logos et du pathos. C’est-à-dire être en capacité de délivrer un discours construit et articulé, rationnel, qui pourtant irradie une émotion collective contagieuse qui devient force politique puissante.

C’est ce passage subtil du rationnel au travers des mailles de l’émotionnel qui fait réussir à l’étoffe l’épreuve du fluide. Le sujet politique aspirant s’il est étoffé, lorsqu’il parle et diffuse sa vision, sa grande stature épouse facilement le moule des consciences dans le peuple par la souplesse du verbe. Comme l’eau du fleuve s’écoule et se moule dans tous les creux et toutes les vases qu’elle atteint dans la grande vallée, l’étoffe politique se diffuse et pénètre à l’instant chaque conscience qu’elle touche dans le peuple.

Dans l’histoire, Périclès stratège de guerre et homme politique de la Grèce Antique, Alexander Hamilton un des pères fondateurs des Etats-Unis d’Amérique et maître Marc Bonnant avocat suisse contemporain sont des spécimen à prendre comme référence sur cette notion qu’est l’étoffe en politique.

De L’Ethos

L’ethos en politique est le principe qui suit une fin en soi, une valeur, que poursuit l’homme public. Cette fin est l’honneur moral. L’honneur moral acquis à bout d’efforts assidus par l’homme public, citoyen d’Etat, induit la valeur de dignité nationale dans la conscience du Peuple.

Tâchons vite de préciser que l’honneur moral est bien différent de l’honneur social. Il en est différent et supérieur d’ailleurs sur l’échelle des valeurs humaines. C’est une valeur propre de Citoyen d’Etat qui s’incarne dans la noblesse d’esprit, un prestige de vertu. Elle diverge donc de la valeur sociale de l’opulence, du gain matériel à profusion qui tend de nos jours à devenir une autre fin en soi, une pseudo finalité des désirs humains.

La conduite journalière personnelle recommandée au Citoyen d’Etat promis aux charges publiques suivra la bonne mesure. Comme choix de vertu, ce comportement classique de bonne mesure s’appelle la médiété. Et la médiété est la recherche du juste milieu entre des agissements de deux extrêmes contraires. Par exemple chez Aristote le courage est le juste milieu entre la témérité et la lâcheté.

Nous pouvons ajouter dans ce sens par exemple que sur le plan matériel, l’aisance est le juste milieu entre l’opulence et l’indigence ; que sur le plan de l’action sociale et politique directe, la tempérance est le juste milieu entre l’agressivité et l’inaction ; que sur le plan de la croyance (l’idéologie et la foi) le pragmatisme (le réalisme) est le juste milieu entre le fanatisme et l’incrédulité.

Mais toutefois, l’homme de grande stature et de bonne étoffe qui cultive en plus la médiété comme ethos saura en temps exceptionnels, moments rares, user d’une brève audace vers un pôle extrême afin de balancer vers le point d’équilibre une tendance ambiante contraire qui deviendrait menaçante pour le cour de l’action publique vers la grande Vision, la finalité collective, la destinée de la nation.

La constance dans la médiété et les rares balancements momentanés sont un exercice très délicat qui demande du don et de l’expérience. Ce don vient du suc mental naturel. Le type mental flegmatique, s’il est renseigné et sain d’esprit, sera plus apte à une telle tâche. Cela tient en grande partie d’un héritage génétique. Car nos caractères de comportements saillants dépendent en grande partie de nos tempéraments qui en sont les soubassements génétiques particuliers, donc de génotypes, soumis à une culture en des milieux donnés. Le suc mental est la glaise épaisse sur laquelle se dépose, s’imprègne et se consolide l’ethos.

En illustration contemporaine comme ethos de médiété en politique citons tout simplement Gandhi de l’Inde et Nelson Mandela de l’’Afrique du Sud ; et comme illustration relative dans le passé lointain le roi Salomon de la Jérusalem antique.

En Somme

En somme, le profil mis en exergue ici est un appel à l’homme public complet. C’est ce genre de candidat qui est nécessaire pour les défis politiques actuels, particulièrement pour des pays en crise larvée comme le Togo. Celui qui a une vision élevée, claire et cohérente (la stature), qui a la communication fluide et pertinente (l‘étoffe), qui a un caractère tempéré, probe et modulable (l’ethos) sera celui-là. Le visionnaire bâtisseur, le rassembleur mobilisateur et le rôle modèle éducateur ; tous cela en Un. Voilà l’ambition.

New York, le 18 Octobre 2019
Michel KINVI