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Banques, télécoms/Le pillage et le bradage continuent : Une nébuleuse fait main basse sur TOGOCOM

Togo - Societe
Le doing busness (faisons les affaires) porte décidément bien son nom au Togo. C’est du moins ce que l’on peut dire sur ce qui s’y passe actuellement avec la vente disons clairement le bradage des banques en cours de privatisation après le pillage organisé par le régime. Dans un pays où les dirigeants sont devenus des hommes d’affaires, tous les secteurs économiques porteurs du pays passent dans leurs mains à travers des sociétés écran ou des deals avec d’autres investisseurs présentés comme des repreneurs. C’est tout de même révoltant et inquiétant pour un pays de vendre toutes ses banques à des étrangers. Au moment où au Ghana, le président Nana Akufo-Addo se débarrasse du FMI dont les dégâts en Afrique ne sont plus à rappeler et qu’il invite à nationaliser les banques afin de financer l’économie de son pays, son voisin de l’Est, c’est-à-dire Faure Gnassingbé, lui, cède toutes les banques à des étrangers, et ceci dans l’indifférence totale des acteurs politiques, de la société civile, des élites...
Le bruit courait depuis plusieurs années sur une probable cession des télécommunications togolaises à des étrangers. Le groupe français Orange était cité parmi les potentiels repreneurs et l’affaire suscitait la polémique et déchaînait les passions. Depuis ce mercredi 6 novembre 2019, l’affaire est conclue et c’est par le canal de Jeune Afrique que la ministre de l’Economie numérique et des postes a annoncé la nouvelle de la cession de ce secteur stratégique à un investisseur malgache notamment le groupe Axian. Désormais le groupe TOGOCOM passe sous le contrôle des Malgaches à 51% et l’Etat togolais conserve seulement 49%. Que s’est -il vraiment passé et qui sont les acteurs de cette nébuleuse ? Pourquoi décider de vendre ce secteur stratégique ou une société qui est la seule rentable au pays même s’il y a quelques soucis dans la gestion?

Les incongruités de Cina Lawson à Jeune Afrique

Depuis des années, des cadres de la société Togocel devenue avec la fusion groupe Togocom, sont convaincus que leur ministre de tutelle était en mission pour liquider totalement les télécommunications au Togo, ou du moins faire passer le secteur sous le contrôle d’un réseau qu’elle maîtrise. Une telle opération pour un secteur aussi porteur et stratégique dans tous les sens pour un pays ne peut se faire sans l’aval de Faure Gnassingbé. Il faut le rappeler, les télécommunications sont avec les mines, les secteurs que l’actuel président n’a jamais lâchés depuis qu’il est entrée au gouvernement en 2002 au poste de ministre des Mines, de l’Energie, des Postes et Télécommunications. Tout en mettant du sien dans cette aventure, dame Cina Lawson n’était en réalité qu’en mission pour son patron.
Les choses sont désormais claires. « 51% de Togocom cédé à un privé. Un consortium composé d’Axian Group et d’Emerging Capital Partners (ECP) va acquérir 51% du capital de l’opérateur public Togocom. Les deux partenaires vont investir 160 milliards de francs CFA sur 5 ans pour révolutionner le secteur numérique au Togo. ECP est actionnaire d’Oragroup et construira une nouvelle centrale thermique à Lomé. Axian est un groupe malgache présent dans 5 secteurs d’activités : immobilier, télécoms, services financiers, énergie et innovation. (…) La formalisation de l’accord s’est déroulée en présence du Premier ministre, Komi Selom Klassou, du ministre de l’Economie et des Finances Sani Yaya, de sa collègue de l’Economie numérique, Cina Lawson, et de Hassan Hiridjee, CEO du groupe Axian ». C’est l’information donnée hier par republicofotogo.com. Quant à Cina Lawson, elle a choisi l’hebdomadaire Jeune Afrique pour communiquer sur la cession.

Cina Lawson une sortie hallucinante et des aveux

Décortiquons un peu cette sortie hasardeuse de dame Cina Lawson dans Jeune Afrique. D’abord, elle nous informe, à l’instar de republicoftogo.com, que 51% du capital du groupe Togocom passe sous le contrôle du consortium Agou Holding, composé du conglomérat malgache Axian majoritaire, dirigé par Hassanein Hiridjee et du capital investisseur Emerging Capital Partners ( ECP). Le nom local « Agou Holding » du nouveau repreneur renseigne davantage sur la vraie identité de ceux qui sont derrière cette opération-suivez nos regards. Sur le montant de la transaction, Cina Lawson estime qu’il reste confidentiel. Comment peut-on mettre sous le sceau de la confidentialité le montant de la cession d’une société d’Etat, c’est-à-dire une entreprise publique, a moins que Togocom soit une société de « Cina Lawson et sœurs »?

Toujours dans la même interview, Jeune Afrique nous informe que Togocom créé en 2017 emploie 1400 personnes et a réalisé un chiffre d’affaires de 120 milliards de francs CFA ( 183 millions d’euros) en 2018. Le groupe Togocom est-il en difficulté, est-il en cessation de payement, en d’autres termes en faillite ? De toute évidence, non. Il y a certes quelques soucis liés à la situaiton de Togotelecom elle-même occasionnée par une gestion calamiteuse; mais dans l’ensemble avec la bonne santé de Togocel, le groupe se porte bien. Il est d’ailleurs le seul à jouir d’une bonne santé dans la gamme des sociétés d’Etat dont la plupart sont en faillite. Alors diantre !
Pourquoi décider de céder à des privés une société qui a fait un chiffre d’affaires de 120 milliards en 2018?

Le scandale est encore plus retentissant lorsque Cina Lawson décline le cahier de charges du nouveau repreneur à savoir, l’investissement de 160 milliards sur 7 ans. Vous vendez un groupe qui fait un chiffre d’affaires de 120 milliards par an à un investisseur qui, lui, ne déboursera que 160 milliards sur 7 ans, soit 22 milliards et un peu plus chaque année. Selon plusieurs sources, le groupe togocom a fait de gros investissements ces dernières années. La fibre optique financée par Togo Cellulaire couvre déjà une grande partie du pays. En dehors de quelques équipements à acquerir pour lancer l’ADSL de Togotelecom, il n’y a plus grand- chose à faire en termes d’investissement. Alors pourquoi privatiser une société qui fait un bon chiffre d’affaires et qui a les moyens de s’autofinancer? On peut poursuivre la réflexion plus loin à partir de l’investissement annoncé du groupe malgache sur 7 ans.

Le Togo ne peut-il pas mobiliser et investir 22 milliards par an dans le groupe Togocom ? Voilà les incongruités qu’on peut relever de cette sortie. « L’important, c’est de rassurer les employés sur le fait que l’Etat reste propriétaire à 49% et qu’il ne sera pas possible de faire n’importe quoi. Nous avons été très clairs sur ce point auprès de nos partenaires. S’il y a des départs supplémentaires, ce seront des départs volontaires ». Voilà un gros mensonge de Cina Lawson. Le groupe Togocom a déjà mis à la porte plus de 300 personnes, et avec cette privatisation, il n’est pas exclu que d’autres employés prennent la porte. Concéder 51% du capital à un repreneur malgache, c’est perdre sa souveraineté et son autorité. Affirmer donc que les nouveaux décideurs ne pourront pas faire n’importe quoi, relève du mensonge. Les nouveaux patrons feront ce qui les arrange parce qu’ils sont venus pour faire des affaires. Qui sont exactement ceux qui se cachent derrière cette transaction scandaleuse?
Groupe AXIAN -ECP, une nébuleuse.

Il est important d’avoir une idée précise sur l’ensemble des acteurs de cette obscure transaction pour comprendre ce qui se joue actuellement. C’est pour cette raison que nous allons passer au scanner les groupes impliqués dans la privatisation.
Groupe AXIAN.

Le groupe Axian est présent dans les secteurs des télécoms, de l’énergie, de l’immobilier et des services. Figure incontournable du monde des affaires dans l’océan indien, le groupe est solidement implanté aux Comores, à la Réunion, à Mayotte et Madagascar. Dirigé par Hassanein Hiridjee, le groupe a acquis une part du capital de Tigo Sénégal, ex filiale du groupe Millicom aux cotés de Xavier Niel et du sénégalais Yerim Sow. Et c’est justement l’apparition de Xavier Niel, un proche du président français Emmanuel Macron, qui rend interessante l’analyse.

Dans une interview accordé à Jeune Afrique le 26 novembre 2015, parlant du patron de Freebox, Hassanein Hiridjee disait : « Telma et le groupe de Xavier Niel sont très complémentaires. Il y a donc une volonté commune de faire d’autres projets ensemble». Xavier Niel, ce proche d’Emmanuel Macron est le principal actionnaire de Free et copropriétaire du journal Le Monde. Son ascension ces dernières années a été la plus spectaculaire, selon nos confrères Mediapart. Toujours selon le journal en ligne français, il n’aime pas que l’on s’attarde sur son parcours et il a multiplié en France des procédures contre les journalistes. Il est désormais et depuis des années dans un consortium avec le groupe Axian. L’arrivée donc de ce groupe à plusieurs visages n’est pas un hasard. On nous avait parlé d’Orange, c’est-à-dire d’un groupe français. A défaut d’Orange, la France reste toujours dans le jeu et à plusieurs niveaux.

Emerging Capital Partners ( ECP)

Ce fonds d’investissement est connu au Togo depuis des années. C’est l’actionnaire principal du groupe Orabank, comme l’indiquent les documents en fac-similé. Il est de notoriété publique que les fonds d’investissements sont souvent des circuits de blanchiment d’argent. La privatisation de la BTD à l’époque de façon obscure et l’omerta qui entoure les vrais actionnaires de cette banque surtout les actionnaires togolais, sont un sujet de tous les fantasmes. Le Directeur Général de ce fonds, Vincent Le Guennou, est très proche des autorités togolaises. Il a été reçu en audience le 12 juin 2019 par Faure Gnassingbé dans le cadre de la pose de la première pierre de la centrale thermique « Kekeli Efficient Power ».

En plus d’être un fonds d’investissement, ECP est l’actionnaire majoritaire de la société ERANOVE qui pilote les travaux de la centrale Kekeli d’une capacité de 65 MW pour un investissement global de près de 64 milliards de francs CFA. Actionnaire majoritaire du groupe Oragroup, dont le siège est au Togo, actionnaire majoritaire de la société Eranove chargée de la construction de la centrale thermique dans la zone portuaire et aujourdhui associé au groupe Axian pour la reprise de Togocom, les éléments du puzzle sont de plus en plus visibles.

Agou Holding, une société au capital de 10 000 francs qui rachète une société d’Etat au chiffre d’affaires de 120 milliards par an
Le clou de cette enquête, c’est la découverte de l’acte notarié de la société locale par laquelle le groupe AXIAN rachète les 51% de Togocom. Dans l’acte notarié en fac-similé, on découvre que la société Agou Holding qui est l’appellation locale des Malgaches ne dispose que de 10 000 f cfa comme capital. Plus intéressant, son siège serait logé dans un immeuble obscur au quartier Djidjolé à Lomé. Voilà les éléments qui attestent que nous sommes en face d’une mascarade sans précédent. Un bradage d’une société d’Etat prospère à des mafieux dont les tentacules sont solidement installées au sommet de l’Etat. Cina Lawson déclarait à Jeune Afrique qu’il y avait d’autres repreneurs qui ne sont pas allés au bout du processus. Pendant qu’on y est, comment le processus de privatisation depuis l’appel d’offres jusqu’à l’attribution a été piloté et qui sont les autres repreneurs qui ne sont pas allés au bout ?

La privatisation du groupe Togocom est l’acte le plus scandaleux jamais posé dans l’histoire de notre pays. D’abord c’est un secteur stratégique qu’on ne saurait laisser quelle que soit la raison dans les mains des étrangers, ensuite le groupe Togocom n’est pas en difficulté financières pour qu’on puisse décider sa privatisation. Il faut ajouter, en plus, le fait que l’opération s’est déroulée dans l’opacité totale et les réseaux qui sont impliqués dans cette privatisation renvoi leur image d’une véritable mafia. Un processus de ce genre avant sa conclusion nécessite une communication devant l’Assemblée Nationale pour des besoins de transparence.

Au vu de tout ce que nous avons développé, il ne fait l’ombre d’aucun doute que les vrais repreneurs qui se cachent derrière ces Malgaches pour faire main basse sur Togocom ne sont autres que les dirigeants togolais. C’est un crime économique que des dirigeants se cachent derrière de pseudo-investisseurs pour racheter les sociétés d’Etat dans l’indifférence de tout le monde, notamment les politiques, la société civile, les parlementaires etc. Bon à suivre !