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Togo - Maxime DOMEGNI : « Le terrain du journaliste d'investigation et de data journalisme… est encore presque vierge »

Togo - Societe
Il a occupé le poste de Rédacteur en chef au bihebdomadaire togolais d'investigation L'Alternative. Il a rejoint la Rédaction de BBC Afrique à Dakar il n'y a pas très longtemps. Aujourd'hui, Maxime DOMEGNI, puisque c'est de lui qu'il s'agit, occupe un nouveau poste sur le plan international. Il est représentant en Afrique Francophone du Global Investigative Journalisme Network (GIJN). Il nous parle de ses expériences.
Bonjour Maxime Domegni. Tu es passé par L'Alternative, la BBC et récemment tu as accédé à de nouvelles responsabilités à la GIJN, comme responsable Afrique Francophone. En quoi consiste ton nouveau job ?

Effectivement depuis le mois de septembre, je suis devenu ce qu'on appelle « Regional Editor » pour l'Afrique Francophone à GIJN. Tout ça peut paraître barbare. Je vous explique. GIJN, c'est une plateforme mondiale des réseaux de journalisme d'investigation et de data journalisme. Le nom original en anglais donne « Global Investigative Journalisme Network ».

Nous avons 184 organisations membres situées dans 77 pays. La mission du GIJN est de diffuser et de renforcer un journalisme d'investigation et le data journalisme de qualité dans le monde entier. Du coup, nous soutenons la création des réseaux, fournissons des outils et des techniques avancés, offrons un service d'assistance et des ressources et formons des journalistes dans le cadre de nos ateliers, webinaires et conférences.

Pour revenir à moi, je dirai que je suis donc représentant de cette organisation en Afrique Francophone. Jusque-là, GIJN, qui est une organisation de droit américain, couvrait l'Afrique dans deux langues (l'anglais et l'arabe, sur les huit dans lesquelles l'organisation diffuse ses ressources au quotidien). L'Afrique francophone étant une part importante du continent avec pas moins de 25 pays et ayant un besoin assez grand de nos outils et ressources, GIJN a pensé qu’il était important de recruter une personne ressource pour l'y représenter. Ils ont lancé l'appel à candidature et j'ai proposé mes compétences qui ont convaincu le leadership de l'organisation. Voilà l'histoire qui m'a poussé à abandonner mes anciennes responsabilités pour rejoindre GIJN.

Au Togo, tu faisais des enquêtes. Doit-on s'attendre à ce que tu en fasses davantage
désormais ?


Disons, non. Mon rôle m'éloigne un peu du terrain. Ce n'est pas un rôle de journaliste d'investigation, mais un rôle de soutien aux journalistes d'investigation, avec des outils, des contacts, des formations.


Quelles seront tes priorités pour l'Afrique francophone?

Pour plaisanter, je vais dire « tout est priorité », comme aiment à dire les politiciens. Plus sérieux, je pense personnellement que le terrain du journaliste d'investigation et du data journalisme en Afrique francophone est encore presque vierge. Nos journaux écrits audio-visuels et nos contenus digitaux dans la région sont encore trop bourrés de « Tel ministre a inauguré telle chose, le président a avancé tel chiffre honorable pour le pays, tel opposant a dénombré tel nombre de victimes, tel officier a nié que tel crime s'est produit dans le pays, telle ONG a fait ouvert tel atelier… ».

Mon rôle consiste à sensibiliser les journalistes à commencer à prendre toutes ces déclarations avec prudence et à profiter des outils disponibles pour les scanner et démêler le vrai du faux, le vrai partiellement vrai. En adoptant cette attitude, nous évitons de servir de porte-voix aux acteurs publics et on rend davantage service à la société qui nous fait confiance pour avoir des informations crédibles. Soit dit en passant qu'aujourd'hui, avec le numérique et tout ce que cela crée comme enjeux, un média qui se contente de relayer des faits déjà largement disponibles en ligne presque instantanément doit commencer par se poser des questions sur son avenir. Idem pour ceux qui ne diffusent que des opinions. Le journalisme que l'opinion attend de nous désormais est celui qui va au-delà des faits, déclarations et documents et qui révèle des choses non perceptibles tout de site ou délibérément cachées.

Mon défi est de rendre possible et de vulgariser ce genre de journalisme en Afrique francophone. Je crois que c'est largement possible. Les outils, ressources et moyens sont là.

Concrètement, comment comptes-tu atteindre ces objectifs ?

Même si je suis le tout premier représentant Afrique Francophone de GIJN, heureusement je suis venu trouver une organisation qui existe depuis 2003 et qui a eu le temps de grandir et de développer des méthodes de travail. GIJN noue et entretient les contacts avec des journalistes et organisations de journalistes lors des ateliers de formation, des webinaires (en ligne) et des conférences. Justement l'une de nos activités phares est la conférence mondiale des journalistes d'investigation (en anglais, Global Investigative Journalism Conference-GIJC) que nous organisons chaque deux ans et qui voit se rassembler pendant plusieurs jours la crème du journalisme d'investigation dans le monde. La dernière, c'était l'année passée à Hambourg en Allemagne. Avant cela, en 2017, c'était en Afrique du Sud, la première d'ailleurs tenue sur le continent. La prochaine est prévue en 2021, en Australie, si la situation sanitaire et les conditions de voyage le permettent. Au quotidien, GIJN diffuse ses contenus via ses pages Facebook (www.facebook.com/gijnAfrique) et son compte Twitter (@gijnAfrique). Nous invitons d'ailleurs les journalistes, les ONGs et tous ceux qui se préoccupent des questions de journalisme d'investigation, de data journalisme, de transparence, de redevabilité ou reddition de compte, à nous suivre sur ces pages pour être au courant des outils et des opportunités qu'on partage.

Comment fait-on pour devenir membre de GIJN ?

Bonne question. Tout d'abord, je voudrais souligner le fait que les outils, ressources et opportunités que GIJN partage sont, évidemment, accessibles à tout le monde. Mais tout le monde ne peut requérir et obtenir le statut de membre de GIJN. Les individus, fussent-ils journalistes d'investigation, ne peuvent être membres. Les médias commerciaux non plus. Mais les réseaux, association, ONG, ou médias d'investigation essentiellement à but non lucratif, sont les bienvenus. Les écoles et centres de formation en journalisme aussi. Les conditions d'éligibilité et toute la procédure d'adhésion sont décrites sur notre site : https://gijn.org/adhesion-a-gijn/.

Un mot aux confrères et consœurs de la presse togolaise ?

Oui, que je reste ouvert à tout confrère et toute consœur qui aura besoin d'un contact, d'une personne ressource, d'un outil, d'une technique, d'une opportunité, d'un conseil… de quoi que ce soit en relation avec le journalisme d'investigation et le data journalisme. Je viens de la presse togolaise et je resterai le plus disponible possible aux amis de la presse togolaise.

Laissez-moi terminer mes propos par ceci : Aujourd'hui ce serait vraiment dommage d'abandonner une idée ou un projet d'enquête journalistique parce qu'on serait limité par les moyens financiers ou bloqué sur le plan technique. GIJN offre justement le cadre pour demander de l'aide. On ne donne pas des financements, mais on pourrait vous recommander des organisations qui pourraient vous aider. On pourrait tout autant vous aider à supprimer les barrières techniques en vous mettant en contact avec des personnes ressources. N'oubliez pas, suivez-vous sur Facebook (www.facebook.com/gijnAfrique) et son compte Twitter (@gijnAfrique) ou envoyez-moi un email à [email protected].

Merci aussi à L'Alternative (qui reste par ailleurs ma maison) pour cette opportunité de pouvoir parler de mon nouveau rôle.